Je vous entraîne à présent dans une nouvelle histoire intitulée : Le sang de Delphine.
C’est une nouvelle épisodique en 6 chapitres et un épilogue.
Aujourd’hui, je vous propose de découvrir le premier chapitre.
Chaque semaine, je vous en publierai un nouveau, sauf si un autre article devait être « plus urgent ».
J’espère en tout cas que ça vous plaira. Si c’est le cas, n’hésitez pas à me le dire en commentaire, à partager et à liker (les petites mains qui applaudissent).
Bonne lecture !
Le sang de Delphine – Chapitre 1
Delphine se redressa. Des gouttes de sueur perlaient sur son front.
– Ça va, maman ? demanda la voix ensommeillée d’Amandine qui était allongée à ses côtés.
– Tout va bien, rendors-toi, mon cœur.
– Encore un cauchemar ?
Sans répondre, Delphine déposa un baiser sur la tête de sa fille qui referma les yeux.
Elle s’allongea contre son enfant et se concentra pour calmer son cœur et sa respiration.
Delphine ferma les yeux. Effectivement, elle venait de faire un nouveau cauchemar. Une chose la hantait depuis des années, mais elle ignorait ce dont il s’agissait.
Elle savait que ça avait un rapport avec son départ de la maison de sa mère. Elle savait que la vie, lorsqu’elle était adolescente, avait été difficile, mais ses souvenirs de cette époque étaient brumeux. Tout à coup son réveil retentit. Elle ne s’était pas rendu compte qu’elle s’était rendormie.
Elle embrassa la joue d’Amandine qui grogna. L’adolescente n’était vraiment pas du matin. Surtout lorsqu’elle était réveillée en pleine nuit par les cauchemars de sa mère, ce qui arrivait au moins trois fois par semaine. Mais elle ne s’en plaignait pas. Elle était surtout inquiète pour sa mère. Elle aurait voulu l’aider, mais que pouvait-elle faire du haut de ses seize ans ?
– Allez, poulette. Il fait jour, il fait beau, le soleil brille et les oiseaux chantent !
Amandine fit la moue et ouvrit péniblement les yeux.
– Je suis obligée de me lever ?
– Oui. Mieux tu seras instruite et mieux tu t’en sortiras dans ce monde. Pas comme moi.
Delphine n’avais jamais fait d’études, et ça avait été l’un de ses plus grands regrets. Pourtant, elle en avait les capacités, mais il avait fallu survivre et s’occuper d’Amandine, alors elle avait été obligée de travailler. Et elle ne voulait pas de cette vie-là pour sa fille.
– J’aime pas quand tu dis ça. Tu es parfaite telle que tu es.
Elles s’enlacèrent quelques secondes.
– Allez, ma grande, il faut bouger.
– J’ai la flemme…
– Je sais. Zou !
Alors que Delphine se leva d’un bond, Amandine se traina hors du lit. L’une se prépara en quatrième vitesse, et l’autre peina à passer la première.
Pendant que Delphine préparait le petit déjeuner, Amandine s’habillait dans la salle de bain. A travers la porte, Delphine la voyait et la conseillait. L’appartement était si petit que Delphine avait à peine à hausser le ton pour être entendue. Amandine prenait toujours en considération les conseils de sa mère, mais elle se réservait le dernier mot.
Pendant qu’Amandine mangeait, Delphine la coiffait. Elle n’en était pas vraiment obligée, mais l’une comme l’autre aimait ce moment de tendresse. Amandine avait toujours été la petite poupée de Delphine. Ainsi, Amandine se raccrochait à sa part d’enfant. Ne pas grandir trop vite, ne pas quitter sa mère trop vite, c’était son souhait. Delphine, elle, profitait de chaque instant, car elle savait que tout ceci ne durerait pas, qu’un jour elle se retrouverait seule.
A six heures trente, elles étaient toutes deux prêtes. Elles partirent à vélo et se séparèrent à un carrefour qui conduisait la première au lycée et la seconde à son travail.
Après avoir parqué son vélo, Delphine monta les escaliers extérieurs qui menaient à son bureau. La plupart des autres employés étaient à l’étage inférieur. Elle ne croisait pratiquement personne de la journée, mis à part son chef et sa collègue de la comptabilité, Alice, qui partageait le même bureau qu’elle.
Arrivée dans son bureau, Delphine se vissa sur son siège et se prit la tête dans les mains.
– Encore une mauvaise nuit ? demanda Alice.
– Horrible !
– T’es allée voir la sophrologue dont je t’ai parlé ?
– J’ai pas le temps.
– T’as pas envie, oui !
– Ecoute, Alice, j’élève seule une adolescente de seize ans, alors je peux t’assurer que je ne roule ni sur l’or, ni sur le temps, s’irrita Delphine.
Elle était lasse d’avoir sans cesse cette même conversation.
– Moi, pour ce que j’en dis… botta en touche Alice.
Delphine roula discrètement les yeux.
– Attention, prévint Alice, voilà le patron.
Delphine se redressa et accrocha son plus beau sourire. Monsieur Noël passa, salua sa secrétaire, Delphine, et s’enferma dans son bureau.
Sautant du coq à l’âne, Alice reprit par son sujet de conversation préféré :
– Depuis combien de temps t’as couché avec personne ?
– Alice ! rougit Delphine.
– Si longtemps que ça ?
– J’ai pas le temps, répétèrent-elles à l’unisson.
Après avoir ri quelques secondes, Delphine reprit :
– Tu vois que tu le sais !
– Je crois toujours que c’est une fausse excuse.
– Crois ce que tu veux.
Pour conclure la conversation, Delphine se tourna vers son ordinateur. Alice savait que c’était le signal qui voulait dire « Laisse-moi tranquille, je bosse. » Elle se rendit alors à son bureau.
Deux heures plus tard, Delphine avait coché toute sa to-do list. Comme toujours, elle n’avait pas assez de travail pour occuper ses journées. Elle avait bien essayé d’en abattre davantage mais lorsque à l’issue de sa première semaine elle avait terminé toutes les tâches du mois, des collègues s’étaient plaintes. Monsieur Noël lui avait gentiment demandé de travailler un peu plus lentement ou il devrait se débarrasser d’elle. Elle était dégoutée. Elle avait voulu lutter, mais elle avait vraiment besoin de ce boulot. Alors elle avait cédé, résignée. Amandine passait avant la justice.
Elle ouvrit un fichier caché sur l’ordinateur et reprit l’écriture de son roman. Elle en était à la troisième réécriture et n’était toujours pas satisfaite.
Juste avant l’heure du repas, Delphine vérifia ses réseaux sociaux. Rien de passionnant. Elle n’osa pas poster une photo de l’avancement de son travail de peur de se faire prendre par le père Noël.
Alice passa la tête à son bureau.
– Tu as faim ?
– Non ça va, merci.
Son ventre émit un gargouillement sonore.
– Ah, c’est la vache maigre ?
Delphine ne répondit pas.
– Viens, je t’invite.
– Je t’ai dit que j’avais pas faim.
– Et moi je te dis que je t’invite.
Delphine rouspéta, mais elle se leva. Alice et elle se rendirent dans le coin snack d’un magasin de meubles. Elles y commandèrent des salades bio végans et s’assirent à une table et papotèrent.
Alice aimait regarder les menuisiers travailler le bois, commenter les tenues et les démarches des clients et adorait paraître parfaite. Delphine n’était pas une grande fan de tout cela. Elle n’aimait pas le cadre qu’elle trouvait trop bruyant et détestait critiquer les autres. Mais elle était reconnaissante qu’Alice la nourrisse aussi souvent.
– Tu en es où de ton bouquin ?
– Au chapitre vingt, il me reste encore trois chapitres et j’ai terminé.
– Va falloir l’envoyer à un éditeur, un jour.
– Quand il sera parfait.
– Le mieux est l’ennemi du bien.
Delphine détestait cette formule. C’étaient des paroles de fainéants, selon elle. Elle préférait faire de son mieux pour ne rien regretter, peu importe le temps que ça prendrait.
L’après-midi, Delphine surfa sur Internet et écrivit un peu. On lui apporta du travail supplémentaire qu’elle régla en quelques minutes. Elle avait toujours eu des facilités avec les ordinateurs. Elle travaillait vite et bien. Au lycée, se souvenait-elle, les professeurs étaient persuadés qu’elle trichait et la faisait recommencer ses exercices. Mais constatant qu’elle était réellement rapide, ils la laissaient vaquer à ses occupations dans son coin, ce qui lui laissait un peu plus de temps pour écrire.
Delphine en revint à ses activités. Lorsque l’heure de partir arriva, Elle avait finalement fait peu de chose et elle se sentait plus épuisée que si elle avait passé la journée à travailler.
Elle rentra à vélo et retrouva son adolescente attablée, faisant ses devoirs en dévorant un morceau de gâteau au chocolat.
Delphine embrassa son front, ouvrit le réfrigérateur et se perdit quelques secondes dans ses pensées. Elle le parcourut du regard et le referma sans rien y avoir pris. Rien ne l’intéressait.
– Ça a été ta journée ?
– Ça va.
Ça allait toujours. Amandine n’aimait pas embêter sa mère avec ses problèmes qu’elle trouvait futiles.
– Tu fais quoi ?
– Des probabilités.
Delphine se pencha au-dessus de l’épaule de sa fille.
– T’as oublié la virgule à la cinq.
Amandine corrigea.
– Tu sais que tu dois me laisser me planter ! reprocha-t-elle.
– C’est pas mieux quand maman t’aide ?
– C’est peut-être mieux, mais maman ne sera pas avec moi le jour du devoir. Alors il faut que j’apprenne seule.
– J’ai juste dit que tu t’étais trompée, t’as trouvé toute seule où.
– Le docteur Durand a dit que tu devais accepter que j’échoue.
Delphine souffla. Elle marcha quelques instants dans la cuisine, sans savoir quoi faire. Amandine leva la tête.
– J’ai encore deux exercices et j’ai fini. Va regarder la télé en attendant.
– J’ai pas envie.
– Trouve toi une occupation, j’ai presque fini.
Le téléphone sonna. Enfin quelque chose à faire ! Delphine se précipita.
– Allô ?
Une voix d’outre-tombe, tel un râle, s’éleva du combiné :
– Delphine, il faut que tu rentres, il a besoin de toi.
La personne raccrocha. Delphine resta sans bouger. Elle loupa une respiration. Son rythme cardiaque s’accéléra.
– C’était qui ? demanda Amandine d’une oreille distraite.
– Ma mère, répondit Delphine d’une voix blanche.
Si ce chapitre vous a plu, n’hésitez pas à le liker, le partager et commenter, ça m’aide beaucoup. Et vous pouvez filer lire la suite ici.
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